Depuis les années 1960, le tourisme de masse permet à des centaines de milliers de personnes de partir chaque année en vacances, mais aussi de soutenir économiquement le secteur. Requalifié de nos jours en « surtourisme », il semble atteindre aujourd’hui ses limites. Les études le montrent : l’attrait pour ce mode touristique perd progressivement en intérêt. La cause ? Une prise de conscience de ses conséquences néfastes et le souhait, pour certains, de vivre des expériences plus authentiques. Du paddle en compagnie de pingouins jusqu’au transport de meule à dos de mulet – le choix semble aujourd’hui infini. Tour d’horizon…

Suivant les destinations, l’afflux continu de vacanciers, encouragés par une offre toujours plus conséquente de vols low-cost, ne cesse d’augmenter. Pour preuve, selon l’Organisation mondiale du tourisme, les arrivées de touristes internationaux ont augmenté de 7% dans le monde en 2017, pour atteindre un total de 1,322 milliard. Afin de mieux les contrôler, des municipalités ont décidé de réagir. A l’instar de Venise, en Italie, qui impose dès cet été à ses touristes de payer un droit d’entrée. Le mouvement gagne aussi une catégorie de voyageurs, qui aspirent désormais à davantage d’authenticité à travers des « expériences ».

Mais de quoi s’agit-il exactement ? En octobre dernier, le site néerlandais Booking menait une enquête sur les futures attentes des voyageurs. L’un des constats fut le suivant : 60% des personnes interrogées ont émis le souhait de « vivre une expérience au cours d’un voyage ». S’il n’existe pas (encore) de définition exacte de ce tourisme d’expérience appelé aussi expérientiel, celui-ci se caractérise par la volonté de voyager différemment, à l’opposé des offres packagées proposées par les tour-operators. Ainsi, les touristes expérientiels préféreront dormir chez l’habitant, consommer mieux et « durable », participer à des activités locales, à des projets solidaires…. Le principe fondamental étant d’entrer en contact avec les communautés locales, de partir à leur rencontre, de partager et respecter leur mode de vie.

Tourisme participatif

A cette idée de voyager plus authentiquement, le tourisme participatif semble apporter en premier lieu une réponse de choix. En effet, l’état d’esprit de celui-ci repose sur la volonté de tisser des liens entre visiteurs et habitants dans un cadre non-marchand. « Venez en visiteur, repartez en ami » claironne sur la page d’accueil de la version parisienne du site Greeters.  Les Greeters sont des hôtes bénévoles, regroupés en communauté dans le monde entier, qui offrent des balades gratuites en leur compagnie. Un excellent moyen de pénétrer la culture locale, et à moindre frais.

Loin d’être un nouveau concept – les premiers Greeters ont fait leur apparition en 1992 à New York, sous l’impulsion de l’Américaine Lynn Brooks. L’initiative collaborative connaît par ailleurs en France un regain de popularité. Elle est ainsi devenue en quelques temps le pays qui accueille le plus d’antennes de Greeters dans le monde. Et son chiffre est en constante augmentation : 31 en juillet 2014 et plus de 50 en 2017 ! Signe que le tourisme collaboratif a plus que jamais le vent en poupe.

Activités thématiques

Directement inspirées des Greeters, les sites recommandant des activités avec des locaux se multiplient sur Internet. Ainsi, Like a local, promet de vous faire découvrir la ville en compagnie de « vrais locaux » et « d’éviter les pièges à touristes ». Toutes les capitales et grandes villes sont représentées avec plus ou moins de choix. La plupart vendent des visites de musées, des balades, des cours de cuisine traditionnelle. A leur tour, les géants de l’Internet Tripadvisor, Expedia et même Booking, en complément des attractions et excursions habituelles, ont décidé d’intégrer, au sein de leur plateforme, des activités thématiques animées par des particuliers. De quoi apporter une touche authentique, par rapport aux offres formatées des voyagistes déjà présentes sur les sites.

En Suisse, par exemple, la plateforme Dzin – du patois fribourgeois signifiant gens – « met en relation des locaux souhaitant partager leur passion, leur métier ou leur amour de la région avec des visiteurs en quête d’échange, d’authenticité et d’ « expériences différentes ». Et ici, le gage de l’authenticité est fort. Sont ainsi proposées des activités comme le transport de fromage d’alpage à dos de mulet ou encore un atelier de fabrication de moutarde de bénichon, suivi d’une dégustation de cuchaule bio au safran.

Les municipalités et offices de tourisme (OT) se mettent également au diapason. Afin de désencombrer certains quartiers, la Mairie de Paris entend inciter les touristes à se tourner vers d’autres (re)coins de la capitale française. « Nous voulons promouvoir de nouvelles expériences touristiques à Paris alors que Paris surchauffe, Paris sature. Les sites touristiques sont parfois trop fréquentés. Et puis la clientèle individuelle, qui est déjà venu une ou plusieurs fois à Paris recherche de l’authenticité », a récemment expliqué au site spécialisé Business Travel l’adjoint en charge du Tourisme et des Sports à la Mairie de Paris, Jean-François Martins. Pour cette première « expérience » alternative, l’OT parisien a jeté son dévolu sur Montparnasse. Ainsi, cinq balades, avec des thèmes comme l’architecture ou l’écologie, sont à découvrir… en dehors des sentiers battus.

Expériences uniques

« Promouvoir de nouvelles expériences », c’est aussi le crédo de la la plateforme star de réservations de logements entre particuliers Airbnb depuis 2016. Regroupées par thématiques (nature, musique, art, vie nocturne, sport…) sous le nom d’Expériences, il s’agit d’activités créées et proposées par des habitants. Le service promet « davantage que des visites ou des cours classiques, en offrant aux voyageurs une totale immersion dans l’univers unique de chaque hôte ». En d’autres termes, de garantir au touriste un moment unique et insolite.

Les Expériences suggérées vont de la balade en paddle avec des pingouins au Cap au dîner dans un atelier d’artistes à Paris en passant par un cours de taxidermie végétalienne à Londres. Plus grand-chose à voir avec la promenade au bras d’un local dans l’East Village newyorkais. D’ailleurs, Airbnb entend pousser encore plus loin le concept de l’expérience, voire de l’expérimentation. Prochainement, les voyageurs pourront participer à des activités avec des thématiques comme le Social Dining, (dîner social), l’Aventure ou l’Expérience Solidaire. L’idée étant d’offrir une palette toujours plus importante et plus originale de « choses à faire ».

Et ça marche ! En 2017, le taux de réservation de ces Expériences a augmenté de 2 500%. Aujourd’hui, plus de 5 000 sont disponibles dans 60 destinations. Quant à la France, le service a connu un développement rapide : en un an, le nombre des Expériences a été multiplié par sept. Emmanuel Marill, directeur d’Airbnb France, déclarait en 2017 : « Les Expériences Airbnb ont à peine plus d’un an mais on note déjà que leur croissance est 25 fois plus rapide que celle des logements au lancement de la plateforme. »

Alors, plutôt unique ou authentique ? Il ne vous reste plus qu’à choisir l’expérience qui vous correspond le mieux.